Totalement inhumaine
Critique des lecteurs

 

Actualité de l'auteur

Interviews et portraits

Dialogue avec l'auteur

Facebook

 

 


Le successeur n'a pas d'épiderme

Par Benoît Drapeau

Peut-on discourir librement sur la portée d'une projection ?

La description de ce sujet que nous décrit J.M Truong n'est pas innocente. Je trouve d'ailleurs que cette celle-ci est assez élogieuse. Comment ne pas être fasciné par autant de pouvoirs, de migrations d'un bien cher à l'humanité qu'est son intelligence. Cette faculté d'adaptation à des fins de survie, de maîtrise de l'angoisse risque-t-elle un jour de virer au Tout-minéral ?

Je ne le crois pas. Comme de nombreux lecteurs et critiques de cette liste, je pense aussi que l'objectif premier de ce livre est de nous éclairer. Le successeur est en marche, qu'il court s'il le veut ; nous avancerons d'autant plus avec lui. D'ailleurs, à ce propos, c'est avec une grande difficulté que je tente de le visualiser, de le matérialiser.

A quoi ressemble-t-il ? Que projetons nous au travers de son existence ? A ce niveau, je souffre d'une myopie très handicapante tant il semble être diffus. 

Je retrouve dans cet essai des observations tout à fait vérifiables. Le support de communication que nous utilisons chaque jour nous travaille, nous aliène tant il est massif. Nous le regardons, nous en inspirons, l'embellissons de nos productions mais il nous rend terriblement seul et distant envers notre propre corps. Le sensible est là, métamorphosé en des signes, des écritures, des images... nommons ceci interactif si nous le voulons. Mais plus profondément notre rapport au monde est modifié, manipulé au quotidien. "Nous évacuons de l'inconscience" dans ce modèle interconnecté. 

Désormais liés aux destinées de la production scientifique, il est intéressant de remarquer que celle-ci nous fascine toujours autant. Nous la croyons maîtrisée, futuriste, débordante de générosité et de compassion tant nous apprécions de vaquer à nos occupations favorites. Il est certain qu'elle nous échappe totalement. Et si nous regardons aujourd'hui ce modèle interconnecté d'une façon homogène, tel une mémoire apte à produire elle-même une conscience, nous y observerons peut-être le successeur... notre successeur ?

Il est difficile de ne pas adhérer à la croyance dans ce successeur. Il faut une forte obstination et un recul conséquent pour se rendre compte que ce monstre décrit sans épiderme soulage nos existences de souffrances attendues. A l'image de l'araignée sur sa toile, nous sommes peut-être emmaillotés à des fins beaucoup plus organiques que spirituelles.

©   Mauvais Genres 30-déc.-2002

retour à la page Critiques Lecteurs